La mère de Jean
Charline8817/04/2019L'eau de source
La série de slows s'éternisait et maintenant les deux couples tournaient sur la moquette du salon. La table basse avait été poussée au fond de la pièce et les mains des maîtres des lieux se faisaient plus insistantes sur les parties toujours couvertes des deux invitées. Adèle se laissait bercer par les accords et par les pattes douces qui se frottaient à des plages proches de ses fesses. Mais elle restait sage, ne s'autorisant pas même un débordement manuel. Le souffle qui lui courait dans le cou était de plus en plus saccadé. De temps à autre, les deux autres danseurs lui frôlaient le derrière, mais sans rechercher vraiment à provoquer ces attouchements sibyllins.
Alors qu'elle avait les yeux clos, complètement immergée dans la mélodie musicale, elle sentit d'un coup que la joue qui la collait se dégageait d'elle. Mais c'était pour mieux revenir, se rapprocher en plus intime, plus proche encore de ses lèvres. Et quand la bouche ardente de cette Annabelle se trouva au contact de la sienne, elle sut que c'en était fini de ses bonnes résolutions. Elle, qui n'avait jamais goûté aux fruits féminins, se laissait rouler une pelle active. Et quel baiser !
Une langue agile, alerte, s'enfonçait dans son gosier, une langue qu'elle recevait avec un infini plaisir. Ça n'avait rien de forcé, bien au contraire. Tout en souplesse, tout en tendresse, la blonde lui mangeait littéralement la bouche. Cette baladeuse qui elle aussi valsait dans son palais la projetait vers un univers d'où elle ne voulait plus sortir. Elle le fit pourtant, contrainte par la seule absence d'air et l'obligation de respirer. Dans les yeux d'Annabelle, un éclair de triomphe ou d'envie, allez savoir, lui montrait la reconnaissance de cette femelle.
D'autres baisers aux goûts tout aussi sirupeux réunirent les lèvres et tous ne furent interrompus que par cet insistant besoin de reprendre de l'air frais. Mais les mains de la blonde n'étaient pas restées statiques. Et celle sur les fesses avait si bien su remonter l'ourlet de la jupe que le couple formé d'Hubert et Lucie s'était arrêté. Ils s'étaient tous les deux, l'un contre l'autre, assis sur le fauteuil le plus proche et suivaient les circonvolutions des deux donzelles.
À chaque ronde sur la laine du sol et ce, pendant seulement la moitié d'une révolution bien lente, ils apercevaient la culotte, mais aussi et surtout le porte-jarretelles qui tendait deux bas affriolants. Et la main câline qui caressait, sur le rempart léger du tissu de la culotte, les deux jolies fesses d'Adèle. Tout allait désormais très vite. Enfin, ça donnait l'impression que la soirée s'accélérait pour de bon. Hubert lui aussi fourrageait sous la jupe de sa complice tout en gardant les yeux sur sa femme et ses efforts méritoires pour caresser la rousse.
Les palots aussi leur avaient donné quelques idées et Lucie bécotait le visage de son hôte, mais il détournait systématiquement le cou, se déhanchant pour regarder ce qui se tramait entre les deux danseuses. Le spectacle devenait hautement érotique. Mais c'était bien ce que le couple avait désiré depuis longtemps, et Hubert se félicitait de la venue des deux amies. Il ne regretterait sûrement pas les petits cadeaux remis gracieusement par son épouse à ces deux femmes. Et sur la piste improvisée, les choses avançaient à pas de géant. L'ennui avec les porte-jarretelles, c'est qu'ils interdisent la descente de la culotte sans les avoir au préalable détachés des bas. Et la main d'Annabelle, si elle se trouvait bien entre la dentelle et la peau, ne pouvait pas sans risque d'abîmer la pièce de lingerie fine, faire coulisser vers le bas le cache-sexe. Elle stoppa sa progression en musique pour s'agenouiller devant sa compagne de ronde. La femme à genoux sur la moquette épaisse, le front à hauteur du ventre de sa cavalière, elle aussi statique désormais, cherchait avec fébrilité les attaches qui reliaient les bas à la lingerie fine. Elle prit tout son temps pour désolidariser les uns des autres. Un régal pour les deux qui roucoulaient en surveillant les manœuvres d'approche.
Les notes s'égrenaient sans plus personne pour suivre le rythme, mais le bruit de fond restait bien agréable aux oreilles des quatre qui savouraient de bien des manières ce moment rare et plaisant. Adèle avait maintenant la culotte à mi-cuisses et la bouche de sa vis-à-vis bisait doucettement la toison qui gardait le secret sur son sexe. L'autre s'affolait de voir, de humer, de sentir cette caverne si proche et pourtant encore si inaccessible. Quant à Hubert, il avait depuis longtemps plongé quelques doigts dans le tabernacle de la femme assise sur lui. Le bruit de leur passage, joyeux clapotis sympathique, ne laissait planer aucun doute sur l'activité digitale du bonhomme.
Une odeur, une fragrance intime envahissait peu à peu le salon, et la température montait insensiblement. La bouche qui salivait sur le buisson roux venait d'une langue vicieuse d'entrouvrir la conque marine aux senteurs iodées. Les soupirs sortaient de la gorge rejetée en arrière par la rousse qui ne se soustrayait nullement à la léchotte qui la tétanisait. Elle avait seulement remonté ses deux paumes bien à plat sur la nuque de la lécheuse et appuyait sur la tête pour lui indiquer – mais était-ce nécessaire ? – le degré de son émoi. Et sur le fauteuil, la croupe incendiaire sous la jupe se berçait au lent pistonnage des doigts d'Hubert.
N'y tenant plus, envahie par trop de frissons, Adèle se laissa tomber elle aussi à genoux, face à sa tourmenteuse. Une autre série de baisers provocants prolongeait le feu qui couvait en tous ces personnages uniquement réunis pour un plaisir d'un soir. Les soupirs des unes se mêlaient à ceux des autres, entrecoupés aussi par ceux plus mâles du seul mec de la partie qui continuait à se rincer l'œil alors que deux corps roulaient, enlacés sur le sol. Par quel miracle les vêtements des filles qui se reléchaient les babines finirent-ils en tas au bout du sofa ? Impossible à dire.
De son côté, emportée par l'élan des deux autres qui se gouinaient d'une si belle manière, Lucie avait décidé d'entrer dans le jeu de son comparse. Elle ne l'avait pas totalement dénudé, non : seule sa chemise était allée rejoindre le tas de nippes des dames. De la braguette ouverte, elle avait permis à l'oiseau trop à l'étroit de s'ébattre en pleine lumière et la bouche gourmette plus que gourmande s'offrait le luxe de titiller un gland rose et lisse. Le roseau ne pliait pas, et Hubert n'arrivait plus à garder les yeux fixés sur les deux elfes qui se donnaient du plaisir.
Adèle, réticente au départ de la soirée, se trouvait d'un coup bien moins empruntée. Sa bouche aussi parcourait cet espace qui, bien que moins velu, ressemblait si étrangement au sien. Le fin duvet bien taillé ne la répugnait en rien, et elle suivait aussi du regard et de la langue les deux lèvres qui s'entrouvraient sous le passage de son index. La liqueur avait un goût qu'elle n'aurait su définir, ni amer, ni âcre ; non sucré et pas doux, quelque chose d'inconnu quelques minutes auparavant. Mais elle y replongeait avec délice pour le plus grand bonheur de sa complice qui, du coup, n'arrivait plus à lui sucer le clitoris comme elle l'aurait désiré.
Le salon n'était plus que petits cris et débordements sexuels en tout genre. Deux couples distants de quelques centimètres mais qui n'interféraient pas entre eux, sauf par les yeux du mari. Hubert était heureux de voir, de sentir sa femme qui prenait un pied monstrueux sous la langue et les pattes de cette sublime inconnue. Quant à la poupée qui lui léchait la trique, soit elle savait faire abstraction de ce qui se passait autour d'elle, soit elle était si acharnée à la tâche qu'elle n'entendait plus ces plaintes qui fusaient dans la pièce.
Le soixante-neuf entre les deux femmes était de toute beauté. Adèle avait oublié ses restrictions et passait outre ses refus. Elle était maintenant plongée au cœur du problème et sa langue fouillait autant le sexe d'Annabelle que celle-ci lui rendait la monnaie en pénétrant le sien. Tantôt c'était la blonde qui était sur la brune, tantôt c'était l'inverse, et les deux corps roulaient sur la laine dans des plaintes qui annonçaient une jouissance prochaine.
Des halètements singuliers firent cependant dresser les deux visages qui continuaient de se brouter le minou. Hubert n'en pouvait plus. À un mètre des deux furies dévoreuses de chattes, il avait fait mettre à quatre pattes Lucie, et elle, le dos ployé, avait la tête enfoncée dans la moquette. Il la limait tout en bénéficiant du spectacle des deux femmes en folie. Le ventre du bonhomme claquait contre les fesses de sa cavalière qui griffait la laine de ses ongles longs et rouges. De plus, elle feulait comme une vraie chatte en chaleur.
Un instant, la bouche de la douce Adèle en oublia ses devoirs envers le sexe trempé de la maîtresse de maison, mais Annabelle, de deux doigts dans la foufoune, lui rappela qu'elle aussi attendait un orgasme sur le point d'éclater. Alors Adèle se remit à l'ouvrage, et cette fois la blonde inonda la lécheuse qui n'avait pas eu le temps de reculer sa frimousse. Lorsque, les deux cuisses écartées, l'épouse d'Hubert sentit arriver l'énorme vague, elle serra les jambes sur le cou de celle qui poursuivait ses frictions linguales sur son clitoris, et ce fut comme un jet violent, un geyser qui explosa au milieu de ce mélange fait de cuisses et d'une bouche. Le liquide clair n'arrêtait plus de couler, expulsé comme lors d'une miction ; à croire que la femme en avait une réserve incroyable. Tout son corps se trouva secoué par cette jouissance phénoménale, à tel point que le couple qui copulait toujours près des femelles stoppa net sa chevauchée pour assister à ce spectacle autant visuel que sonore.
Les tremblements de la blonde durèrent encore bien longtemps après qu'Adèle se fut retirée sur le côté. Dans son délire inouï, Annabelle s'était raccrochée à la première chose qu'elle avait découverte à portée de sa main, et il se trouvait qu'il s'agissait du poignet de Lucie. Petit à petit, les tressaillements du corps de la femme se calmèrent. Elle rampa pour venir une fois encore prendre la bouche de sa partenaire.
— Merci ! Jamais personne ne m'avait fait jouir de la sorte. Tu es… merveilleuse.
— J'avoue que j'ai aimé, même si je n'ai pas joui aussi violemment. Enfin, c'était plus feutré, plus intériorisé.
— Tu veux que je te caresse encore un peu pour que tu prennes encore du plaisir ?
— Non ; à force, ça devient douloureux.
— Oui, je sais. Mais bon sang, comme j'ai adoré ça ! Tu reviendras ? Dis, tu reviendras ?
Puis d'un coup, s'avisant que le couple composé de son mari et de Lucie ne bronchait plus et les observait, elle les exhorta :
— Eh bien, vous deux, continuez, ne vous occupez pas de nous, faites-vous plaisir. Je vais chercher du champagne. Tout le monde en veut ?
Ce fut un oui unanime qui lui revint de la part des participants. Alors elle se leva avec grâce et fila vers la cuisine. Le bruit de la porte d'un réfrigérateur qu'elle ouvrait se fit entendre, puis le cliquetis de verres entrechoqués, et enfin la maîtresse de maison, splendide dans sa nudité intégrale, rejoignit le groupe où seuls deux danseurs assuraient encore le spectacle. Hubert et Lucie avaient repris un rythme de croisière pour un coït plus soutenu.
La brune hurla un peu trop fort ; à nouveau, Adèle sut que son amie simulait trop. Ça ne faisait pas naturel ; sans doute que le mâle trop pris par son déhanchement ne s'en rendait pas compte, mais le regard qu'avait jeté Annabelle à la rousse montrait qu'elle avait aussi saisi le manège. Ni l'une ni l'autre ne vendirent la mèche : entre femmes, elles pouvaient pour une fois se serrer les coudes, et puis rien n'interdisait au mari de prendre son pied. Du reste, il venait de se retirer de ce con accueillant, et la fusée de sperme qui avait atteint le dos de Lucie attestait de la virilité préservée du bonhomme.
Hubert n'avait pas tenté de tripoter Adèle. Il avait vu Annabelle profiter de l'amie de Lucie, ce qui suffisait à son bonheur. Et le spectacle offert par les deux dames en pleine extase avait quelque chose de magique : les yeux de sa blonde brillaient comme deux diamants, et il avait pu se rendre compte combien elle aimait les amours saphiques. Il avait aussi bien entendu pris un plaisir magistral avec Lucie, décuplé par la vision de ce bouquet floral engagé par les deux corps sublimes. Repu et vide, il passa encore quelques minutes ses mains chaudes sur les petites flaques que son jonc avait projetées sur le dos de sa monture.
Les deux amazones s'étaient encore livrées à deux ou trois figures libres, puis les invitées s'étaient rhabillées. Pas de douche, pas d'effusions intempestives. Toujours une sorte de discrète fuite, comme à chacune des visites de Lucie. Cette femme était remplie de ressources et avait des connaissances… charmantes. Jamais non plus ils ne parlaient des rendez-vous à venir : Hubert savait comment la contacter, ce qu'il le ferait sans hésiter ; Annabelle saurait bien le lui réclamer. Il voyait le visage de cette épouse friande de plaisirs libertins illuminé et souriant : son objectif était atteint.
Ses affaires marchaient bien, et l'amour qu'il portait à sa femme l'avait un jour amené à fréquenter ces chemins de traverse dans lesquels il la voyait s'épanouir un peu plus ce soir. Elle était belle, rayonnante de ce bonheur tout neuf qu'ont ceux qui découvrent un univers nouveau.
Tous ensemble, ils avaient bu une seconde bouteille de champagne, puis les deux convives étaient reparties vers trois heures du matin. Annabelle était revenue chercher les clés du secrétaire un peu avant le départ des donzelles : le mari savait donc que son épouse avait rallongé la sauce et que la prestation serait donc légèrement plus onéreuse, mais c'était le prix du silence et du secret tout autant que celui de la quiétude et de la plénitude. De toute manière, depuis qu'ils recevaient cette Lucie, ils n'avaient eu qu'à s'en féliciter.
Les deux femmes n'avaient pas voulu prendre de douche et s'étaient éclipsées dans le froid de la nuit noire. Lui et sa moitié auraient encore de longues heures pour parler de tout cela. Et puis il avait aussi envie de retrouver ce ventre aimé : Hubert était bien dans les autres femmes, mais encore mieux dans la sienne !
— Eh bien, pour quelqu'un qui n'avait jamais eu de relations féminines, tu peux te vanter de l'avoir fait grimper aux rideaux, notre Annabelle ! Son mec était très, très content.
— Oui ? Ben c'est tant mieux parce que je ne ferais pas ça tous les jours.
— Et puis grâce à ta performance, ils nous ont gratifiées d'un joli supplément…
— Tu ne vois donc dans ces sorties qu'un intérêt purement matériel ?
— Tu ne vas pas cracher dans la soupe, hein. Ouvre donc cette bon Dieu d'enveloppe, et tu seras complètement rassurée. Dis-moi qu'à ta foutue filature tu ramassais en un mois ce qu'ils nous ont remis là ? Allons, honnêtement.
— Sur ce plan, tu as raison ; mais ça me dérange de « gagner mon pain sur le dos », comme aurait dit ma mère.
— Allons, le plaisir aussi était là, et n'est-ce pas cela l'essentiel ?
— Peut-être, encore que parfois j'ai pu douter du tien.
— De mon… Ah, ça s'est donc vu tant que cela ?
— Vu, peut-être pas ; entendu, sûrement !
— Je te garde chez moi jusqu'à midi. J'ai une douche, et tu puiseras dans ma garde-robe ; pour les sous-vêtements au moins.
— Ah, pourquoi pas ? Tu as une chambre d'amis ?
— On peut partager mon lit aussi, si tu veux…
— …
— Ne fais pas cette tête-là, je rigole ! Tu as bien vu que je ne touche pas aux nanas.
L'une après l'autre elles s'étaient douchées, et l'eau chaude avait de nouveau nettoyé les souillures de la rousse ; puis, dans un grand lit frais, elle avait directement plongé dans l'abîme de l'oubli.
Le Soleil avec ses pâles rayons l'avait tirée de son néant vers onze heures trente. Son ventre réclamait son thé quotidien et de quoi se sustenter. Lucie, les tifs enroulés dans une serviette, avait tout du fakir et se baladait en peignoir. L'odeur de son abominable café flottait dans la cuisine.
— Alors, bien récupéré ? Quelle soirée ! Je suis moulue. Et toi, comment tu te sens après toutes tes galipettes ?
— Bizarre, et pas chez moi. Sinon ça va, je suis à peu près en forme.
— Tant mieux. Partante pour recommencer une autre fois ? Pas tout de suite, je le conçois bien… mais dans quelques jours ?
— Je… je ne sais pas trop.
— C'est pourtant simple. Le jeu en vaut-il la chandelle ? Là, toi seule peux peser le pour et le contre. Tu as regardé ton… cadeau ?
— Non, pas encore.
— Ne me dis pas que ça va encore aller au fond du tiroir de ton armoire ! Tu sais, c'est le premier endroit que les voleurs visitent quand ils dévalisent les maisons.
— Ne me porte pas la poisse, veux-tu ? Non, ce qui m'inquiète c'est que Jean ne m'a pas rappelée. Il est parti fâché dimanche soir, et depuis il me fait la gueule.
— Ça ne doit pas être si grave. Il a du boulot avec son année scolaire, et puis se mettre en pétard pour des riens, c'est le propre des jeunes d'aujourd'hui.
— Pas si sûre que ce soit juste un coup de gueule, comme tu dis.
— Tu as envie d'en parler ? Vous vous êtes chicanés pourquoi ?
— Oh… rien, ça va passer. Je ne peux pas, je n'ai pas envie de parler de cela.
— À ta guise, mais si tu as besoin de moi, je serai toujours là ; un renvoi d'ascenseur, quoi ! Les amies, les vraies, sont aussi faites pour cela.
— Humm…
Adèle avait maugréé sans que sa copine puisse comprendre la suite. Après le petit déjeuner, Lucie l'avait raccompagnée chez elle, et effectivement l'enveloppe et son supplément étaient allés rejoindre sa consœur dans sa cachette. Elle devrait songer à fourrer tout ça ailleurs : sur ce point-là, la brune avait raison. Mais elle n'avait toujours pas daigné regarder le contenu des deux « dessous de table ».
Le téléphone fixe n'avait reçu aucun appel ni message en attente, donc Jean était bel et bien en rogne. Elle se surprit à être énervée après ce petit con, ingrat au possible. Mais parler de cela, même avec Lucie, lui paraissait impossible. Une larme de rage apparut au coin de ses yeux. Elle n'allait tout de même pas céder à la pression exercée par ce… Bon, c'était toujours son fils ; mais ça… Faire ce qu'il voulait était bien au-delà de ses forces ; sur ce plan-là, elle ne plierait pas.
Quelque part, elle eut toutefois l'impression que sa détermination s'émoussait. Ce n'était pas Dieu possible de songer une seule seconde à lui donner satisfaction, mais son ventre pourtant rassasié par toute une soirée de bienfaits la trahissait à demi. Elle s'horrifia d'avoir ce genre d'idée saugrenue… Non ! Elle ne le ferait pas. Mais au fond d'elle… les mots de Lucie… elle sut c'était cela, la solution.
Jean l'avait trouvée plutôt jolie, et il le lui avait dit. Elle cherchait au fond de son cerveau les mots qu'il avait employés : « … en tout cas, elle est bien jolie ta copine. » Il lui semblait bien qu'il avait marmonné cette phrase. Après, ça ne la sauverait pas de ce naufrage qu'elle appréhendait déjà. Lucie s'était pourtant bien permis de lui demander de mettre son ventre, sa chatte, son corps à la disposition d'inconnus, et elle ne s'en plaignait pas ; mais pourquoi ne pas lui demander à elle de se rapprocher de son Jean… juste une fois, juste un soir. Encore fallait-il trouver le bon angle pour lui parler de cette histoire, et c'était là que le bât blessait. Lui raconter que son gamin était un fils indigne qui songeait à se taper sa propre mère, lui parler de ce genre de truc… impensable pour Adèle.
Elle passa sa journée à flâner et à épier les moindres vibrations de ses téléphones, mais ils demeurèrent obstinément muets. Pas d'appel en provenance de ce sale gosse. Et à l'heure du film la rousse pestait encore après ce moutard qui était têtu, comme son père. Mais l'idée, bien que confuse, faisait son petit bonhomme de chemin dans le cerveau de la belle rouquine. Jean et Lucie, Lucie et Jean… oui, une riche idée à creuser.