Bécassine est enceinte

Je me réveille avec un horrible mal de crâne et l'estomac en vrac. Je suis allongé sur un lit, vêtu que d'un caleçon. Il ne me faut pas longtemps pour reconnaître la chambre où j'ai grandi, même si la décoration a été modifiée par mes parents depuis que j'ai quitté leur domicile. J'entends remuer à côté de moi et me tourne vers le bruit : Bécassine est assise sur la chaise de mon ancien bureau. Elle s'est connectée à Internet grâce à l'ordinateur.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demandé-je, les idées confuses.

Elle se retourne et me sourit.

— Tu nous as fait une frayeur… Tu as failli te noyer dans la mare. J'ai dû plonger pour aller te chercher.
— Euh… merci.
— Tu étais bourré, tu disais n'importe quoi ; tu as même parlé de mariage.
— J'ai fait ça ? Merde !

Je crois que les souvenirs commencent à me revenir doucement. Je me revois en effet attirer Bécassine vers la mare. Je voulais lui avouer la vérité sur ma sexualité. Mais le mariage ? Pourquoi ai-je parlé de mariage ?

— Quelle heure est-il ?
— Vingt-deux heures. Tu as dormi toute la fin d'après-midi. Après t'avoir récupéré de la mare, ton père et un autre type t'ont monté ici et t'ont déshabillé. Ta mère a fait sécher tes vêtements et moi j'ai veillé sur toi.
— Purée, quelle journée de dingues ! À éviter à l'avenir.
— Moi, je me suis plutôt bien amusée. Ça faisait longtemps que je n'avais pas fait de repas de famille.
— Amusée ? À quel moment ? Quand tu as appris que tu étais enceinte ? je lui crache sur un ton sec.

Bécassine ne répond pas et se renfrogne. Je me suis montré trop brusque. Je devrais avoir plus de tact. Ce n'est pas évident pour elle, surtout que c'est son corps que le fœtus squatte. Mais nous sommes seuls, et c'est le moment d'aborder le sujet de cet amas de cellules.

— Tu es sur Internet ? lui demandé-je. As-tu essayé de voir ce qu'ils disent sur les avortements ?
— Tu souhaiterais que j'avorte ?
— Vois-tu d'autres solutions ?
— Bah… je ne sais pas, hésite-t-elle. C'est ta mère qui va être déçue. Elle qui se faisait une joie d'être grand-mère…
— Je ne vais pas m'amuser à garder un enfant juste parce que ma mère veut que j'en aie un. Cet enfant est un accident ; elle devra se faire une raison.
— Mais elle va m'en vouloir ! se plaint-elle.
— Bécassine ! Tu la connais à peine ; qu'est-ce que tu t'en fiches de ce que ma mère peut bien penser de toi ?
— C'est juste que j'ai eu l'impression de refaire partie d'une famille, aujourd'hui. Tout le monde m'appréciait et m'acceptait.
— Au pire, on peut toujours raconter que tu as fait une fausse-couche. On ne peut pas garder cet enfant, de toute façon. Nous n'avons pas le choix. Nous ne…
— Je veux le garder ! me coupe-t-elle.
— Bécassine, voyons, tu sais très bien tout ce que ça implique.
— Non, je ne sais pas tout ce que ça implique, mais j'ai un petit être dans le ventre, et maintenant qu'il est là, je ne veux pas le faire disparaître. C'est notre enfant, et je l'aime déjà. Je sais que ça va être difficile, mais j'aurai ce bébé et je m'en occuperai même si je me retrouve seule.

Je me rends compte que je n'ai pas vraiment cherché à connaître son opinion et ai plus tenté d'imposer la mienne, mais nous sommes tous deux concernés et je ne peux pas la forcer à faire quelque chose qu'elle ne veut pas. C'est vrai que j'ai moi-même toujours eu des réticences vis à vis de l'avortement, mais dans notre cas ça me semblait nécessaire.

— Tu es sûre de toi ?
— Oui… Non… Oui… Je vais être maman. JE VAIS ÊTRE MAMAN ? Oh, mon Dieu, mais qu'est-ce que je vais faire ? Comment vais-je pouvoir m'en occuper ?

Elle panique, maintenant. Elle commence vraiment à se rendre compte de ce dans quoi elle s'engage, mais j'ai la sensation qu'elle ne fera pas marche arrière. Elle paraît si fragile à cet instant, si démunie… Mon instinct protecteur se réveille ; je lui prends la main et l'attire sur le lit à côté de moi. Elle se jette dans mes bras.

— Du calme, Bécassine. Si cet enfant vient au monde, je ne le laisserai pas grandir sans père. Je serai là pour te donner un coup de main. Peu importe comment on s'organisera, mais on trouvera un moyen.
— Merci.

Elle me dépose un petit baiser sur le bord des lèvres. Petit baiser qui en devient rapidement un gros. Nos langues s'emmêlent et une vague de frissons remonte le long de ma colonne vertébrale. Puis nos bouches se décollent et nous détournons notre regard l'un de l'autre. Cette fois, c'est bon : je vais vraiment devenir père ! Je ne sais pas si je dois m'en réjouir ou paniquer. Je suis situé quelque part entre les deux, avec une touche de colère. Tout cela ne serait pas arrivé si Bécassine avait fait attention à ce qu'elle fait. Elle en a fait, des bourdes ; mais celle-là, je crois que ça dépasse de loin tout le reste.

— J'espère que le bébé tiendra de moi, dit-elle doucement.
— Pour le physique, oui. Pour le reste, il vaudrait mieux qu'il tienne de moi, murmuré-je pour moi-même.
— Quoi ?
— Non, rien.

Nous dormons chacun de notre côté dans le lit. Nous passons une bonne partie du dimanche chez mes parents où mon père n'arrête pas de me vanner pour mon plongeon de la veille, mais je ne suis pas d'humeur à rire.

Nous repartons vers le milieu de l'après-midi. Le trajet se fait dans le silence. J'ai besoin d'aborder encore le sujet parce qu'il reste plein de choses à éclaircir, mais je ne sais pas comment lancer la conversation ; et puis je n'ose pas vraiment. Elle dort une nouvelle fois dans mon lit, mais cette fois elle se réfugie dans mes bras. Sur le coup, j'ai envie de la repousser, mais finalement je la serre contre moi. Son doux parfum dans les narines, je me sens un instant en paix.

Le lendemain nous retournons au boulot. Travailler et écouter les histoires débiles de mes collègues me permet de me changer les idées. Mais ce répit est de courte durée : Bécassine me rejoint en milieu de matinée.

— Il faut que l'on annonce la nouvelle à Becca ; je l'ai invitée à la maison ce soir.

Une douleur dans le ventre se réveille. J'ai soudain peur. Je ne devais pas toucher Bécassine sous peine de perdre mes couilles, et je l'ai mise enceinte : elle va me tuer, c'est sûr ! Je passe le reste de la journée à stresser sur cette confrontation encore plus que sur le fait de devenir père.

Et la confrontation arrive vite. Mon cœur sursaute et mes muscles se tendent au moment où la sonnette retentit. Bécassine ouvre la porte et fait entrer la folle furieuse qui, pour le moment, est tout à fait calme. Rébecca tente d'embrasser Bécassine mais la rouquine la repousse et montre à notre invitée une chaise sur laquelle s'asseoir.

— Que se passe-t-il ? s'inquiète Rébecca.
— Je suis enceinte, lâche Bécassine.

Le regard de Rébecca, auparavant doux et posé sur Bécassine, se retrouve en un éclair noir, haineux, et dirigé vers moi. La folle bondit de sa chaise et me fonce dessus. Étant sur mes gardes, je réagis à temps et me sauve avant qu'elle n'ait eu le temps de m'attraper. Elle me court après dans toute la pièce. Je me réfugie finalement derrière le dos de Bécassine et m'en sers de bouclier.

— Toi, je vais te tuer ! crache Becca. Tu vas me le payer !
— PITIÉ ! l'imploré-je.
— Arrête ça ! crie Bécassine. Du calme, Becca, je t'en supplie !
— Pousse-toi ! lui commande Rébecca. Laisse-moi lui régler son compte à ce merdeux.
— Non, tu ne le toucheras pas !
— Béca, tu dois choisir, maintenant : c'est lui ou moi.
— Becca… c'est le père de mon enfant. Désolée.

La tristesse s'abat dans le regard de Rébecca et ses larmes se mettent à couler.

— Adieu, alors… pleure-t-elle en commençant à s'enfuir.
— Non, attends, tente Bécassine.

Mais c'est trop tard : la folle furieuse a claqué la porte et s'éloigne à grand pas. Ouf, ça c'est mieux passé que ce que j'imaginais. Je suis encore entier.

— Bon, ça, c'est fait ! soupire Bécassine. Maintenant c'est sûr, c'est avec toi que je vais vivre.

En effet, il n'y avait que deux possibilités. Soit Bécassine vivait avec Rébecca et je l'aidais et assurais mon rôle de père à distance, soit elle restait vivre avec moi. Nous avons eu peur d'aborder la question, mais celle-ci s'est réglée d'elle-même en quelques minutes. Je commence à me rendre compte que la situation n'est pas si angoissante que ça. Au contraire, je vais faire ma vie avec une femme magnifique avec qui je vais avoir un enfant. Je commence à m'en réjouir.

— Il nous faudra un plus grand appartement, alors, déclaré-je.
— Oh oui, confirme-t-elle en m'embrassant. Dis, tu veux bien me rendre un service ce soir ?
— Quel genre de service ?
— Avec tout ce stress, j'ai besoin de me détendre. On peut commencer par un massage et voir ensuite.

Autant dire que la nuit va être chaude…

Nous trouvons un nouvel appartement dans les semaines qui suivent. Il fait le double de surface et se trouve en plein centre-ville. Le loyer est cher, mais nos deux salaires nous permettent d'y loger.

Aujourd'hui, Bécassine n'est pas venue bosser : elle avait un rendez-vous chez son gynécologue. Je rentre du boulot. Elle n'est pas dans le salon, ni dans la chambre, ni dans la cuisine. Je la trouve dans la future chambre du bébé. Elle est assise et caresse doucement son ventre qui a gagné en volume. Elle est tellement adorable… Je profite de cette douce vision encore un peu tant qu'elle ne s'est pas aperçue de ma présence.

— Ton papa va bientôt rentrer du travail. Bon, je sais, tu vas te dire que maman aurait pu trouver mieux, mais les choses ne se sont pas tout à fait passées comme prévu. Et là, tu dois te demander ce que j'avais prévu exactement. Eh bien, pour être honnête, j'avais prévu de ne pas tomber enceinte. Mais maintenant que tu es là, tout a changé. Et tu vas voir, malgré tout, ton père sera toujours là pour toi comme il a toujours été là pour moi. Tu peux avoir confiance en lui pour ça, et Dieu seul sait qu'on va tous les deux avoir besoin de lui. Il ne le dit pas parce qu'il est gentil, mais je sais qu'il me prend pour une incapable, totalement stupide, qui ne sait pas prendre soin d'elle, et il n'a peut-être pas tout à fait tort. Si je veux bien m'occuper de toi, il va falloir que j'apprenne aussi à bien m'occuper de moi, que j'arrête, par exemple, de coucher avec n'importe qui. Je tiens à dire cependant pour ma défense que, sur ce dernier point, je me suis montrée dernièrement très raisonnable. J'ai besoin de ton père pour qu'il me montre comment être une meilleure femme si je ne veux pas que tu finisses comme mon ancien appartement. On formera une jolie famille, toi, ton papa gay et ta maman lesbienne… Lesbienne ? Je devrais peut-être arrêter de me voiler la face : si je l'étais vraiment, crois-tu que j'aurais des sentiments pour ton père ? Parce que c'est le cas. Je me rends compte que c'est la meilleure et la plus sincère relation avec un homme que j'ai eue de toute ma vie. Mais ton père est gay ; quelle ironie du sort ! Il m'apprécie beaucoup, je le sais, mais jamais il ne sera capable de m'aimer véritablement.

Je fais mon entrée dans la pièce, m'agenouille devant elle et prends ses mains dans les miennes. Elle me regarde attentivement en se demandant sûrement ce que j'ai entendu de son petit discours. Il est temps de lui dire la vérité :

— Bécassine, je ne suis pas gay.
— Quoi ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? Bien sûr que si, tu es gay !
— J'ai toujours fait semblant pour pouvoir rester à tes côtés. J'ai voulu te le dire des dizaines de fois, mais au début tu ne t'intéressais qu'à ma prétendue homosexualité, et après j'ai eu peur de te perdre si je te disais la vérité. Je n'aurais pas pu supporter de te voir partir. Je t'aime trop.
— Quoi ? Mais quel con ! crache-t-elle. Qui est assez con pour se faire passer pour un gay ?

Elle s'énerve, pleure, me frappe la poitrine de ses poings. J'essaye de la calmer, mais mes efforts se révèlent vains.

— Je suis désolé, Bécassine. Je n'ai jamais voulu te mentir ou te faire du mal.
— Mais quel con ! continue-t-elle, en larmes. Tout ce temps à te faire passer pour un gay alors que je t'aimais. Mais quel con ! Quel con ! Qu'attends-tu pour m'embrasser ?

Nous nous embrassons passionnément. Mes larmes se mettent elles aussi à couler. Des larmes de joie ! Bécassine m'aime vraiment, et elle sait enfin la vérité. C'est merveilleux !

— Donc, quand tu m'as proposé le mariage chez tes parents, tu le pensais vraiment ?
— J'étais saoul, donc ce n'était pas réfléchi ; mais au fond de moi, c'est ce que je désirais.
— Alors oui, sourit-elle, marions-nous !

Épilogue

— Tu as pris ton Viagra, mon vieux ? Parce que ça va être chaud !
— Mais, bébé, c'est toi mon Viagra, tu le sais bien.

Bécassine s'assoit sur mes genoux et m'embrasse langoureusement. Mes mains caressent ses seins ; elle gémit. Ils ont beau tomber, je les aime autant que les jours où ils tenaient bien en place, si ce n'est plus.

— Je t'ai déjà raconté ma première sodomie avec mon ami gay ?
— Mais, chérie, c'était moi ; tu ne t'en souviens pas ?
— Toi ? Mais depuis quand tu es gay ? Un vieux cochon comme toi ne peut pas être gay. Tu es sûr que c'était toi ?
— Sûr et certain.
— Bon, d'accord. Alors je t'ai déjà raconté la fois où j'ai fait du stop ?
— Avec le camionneur ? Oui, tu me l'as relatée. Cette histoire rentrait dans ta liste des transports.
— Alors la fois où, avec une copine, on s'est fait contrôler par la gendarmerie ?
— Déjà racontée !
— Mince, alors ! Et la fois où je l'ai fait au musée ?
— C'était avec moi cette fois encore.
— Merde ! Je crois avoir finalement fait le tour de toutes mes histoires de cul. Je n'ai plus rien à raconter.
— Ce n'est pas possible ! Tu as toujours une bonne histoire en réserve. Ça doit être ta mémoire qui te joue des tours ; ce n'est pas bon de vieillir…
— Oui, ça doit être ça. Du coup, raconte-moi une de tes histoires. C'est toujours moi qui raconte.
— Si tu veux, je te raconte mon histoire préférée : la fois où je l'ai fait avec la femme de ma vie. Ce qu'il y a de bien avec cette histoire, c'est que je peux la raconter en milliers de versions différentes.
— Oh oui, j'adore cette histoire ! Et si on lui ajoutait une nouvelle version ?
— Avec plaisir, ma chérie.

Je l'embrasse passionnément en repensant à la magnifique vie que j'ai passée à ses côtés.


Nous nous sommes mariés peu après la naissance d'Armand junior. Ne me jugez pas ! J'étais contre ce prénom, mais Bécassine a insisté.

— C'est comme dans les films ! a-t-elle argumenté.
— C'est des films américains. Je ne crois pas que ce soit utilisé en France.
— Je m'en fous, je veux qu'il s'appelle Armand comme son père.

Je n'ai pas cherché plus.
Quoi qu'il en soit, le mariage s'est très bien passé, à part un petit incident. Au moment où nous nous apprêtions à prononcer nos vœux, Rébecca est soudainement entrée dans l'église, visiblement complètement ivre, et a hurlé :

— Je m'oppose à ce mariage ! Cet homme est un menteur ! Cet homme n'est pas gay !

Bien entendu, tout le monde l'a prise pour une folle. Finalement, elle est restée avec nous jusqu'à la fin de la journée, et après avoir dessoulé elle s'est excusée auprès de moi de m'avoir menacé par le passé. Elle nous a souhaité à tous deux une belle vie.

C'est elle que nous avons choisie comme marraine pour nos deux enfants : Armand junior et sa petite sœur Rébecca qui est née trois ans plus tard. Becca, la marraine, s'est toujours montrée très proche de junior et de notre fille Beckie. Oui, nous avons utilisé le diminutif « Beckie » car c'était plus simple pour la différencier de « Becca » ou de « Béca ». Becca est aussi restée très proche de Bécassine, si bien qu'un jour j'ai fini par avoir des doutes.

— Dis, Bécassine, j'aimerais bien que tu me racontes une histoire.
— Oh oui, mon chéri ! Attends, je réfléchis.
— Raconte-moi la fois où tu as trompé ton mari avec la marraine de tes enfants.
— Je suis désolée, a-t-elle rougi.
— Ce n'est pas grave. Je sais que Becca a toujours énormément compté pour toi, et je n'ai pas de doutes sur tes sentiments pour moi. Ton corps ne m'appartient pas ; tu fais ce que tu veux. Et puis je dois avouer que j'ai toujours fantasmé sur les relations lesbiennes.
— Petit cochon, va ! Cela te dirait, un plan à trois ?
— Bien évidemment.

Mais il n'y a pas eu de plan à trois : Becca s'y est refusée. Malgré tout, je sais qu'à part Becca, Bécassine n'est jamais allée voir ailleurs, même si elle s'est souvent amusée à allumer des hommes, sinon elle aurait fini par me le raconter.

L'autre avantage d'avoir choisi Becca comme marraine, c'est quand Beckie a commencé à fréquenter des garçons. Je n'ai pas eu à les mettre en garde pour qu'ils se montrent respectueux envers ma fille : c'est la marraine qui a voulu s'en charger. Je dois dire qu'elle était bien plus efficace que moi ; il lui suffisait juste d'évoquer l'arrachage d'une certaine partie de l'anatomie des mâles pour les faire réfléchir. Avec cette lueur folle brillant dans ses yeux, les garçons n'avaient aucun mal à la prendre au sérieux.

Junior nous a annoncé son homosexualité vers ses dix-huit ans. Nous avons été fiers qu'il n'ait pas hésité à nous en parler. Avec notre passé et une marraine homo, nous étions forcément une famille très ouverte sur la question. Il a rencontré un beau jeune homme deux ans plus tard avec qui il a fait sa vie. Ça a été plus fort qu'elle ; Bécassine n'a pas pu résister à lui poser la question :

— Fiston, avec ton copain, tu fais l'homme ou la femme ?
— Maman, je fais l'homme, tout comme lui.

Beckie a mis plus de temps à se caser. Elle avait un esprit plus vagabond avec les garçons, mais sans être aussi volage que sa mère. Finalement elle a trouvé chaussure à son pied avec un cordonnier et nous a offert une demi-douzaine de petits-enfants.