La bataille finale (1/2)

Je jure que si un jour je retrouve ce fumier d'Harvey, il payera cher sa trahison et le meurtre de Mario. Putain, je le tenais et il a réussi à m'échapper encore une fois alors que j'étais à deux doigts de lui régler son compte !

Je m'agenouille devant le corps du Scorpion. Je ne retiens pas quelques larmes. Il était l'un des premiers à m'avoir accueilli au Sanctuaire, et c'était un brave malgré que je l'aie chambré. Une main se pose sur mon épaule pour me réconforter. Amalia se tient derrière moi ; son visage est aussi triste que le mien.

Nous entendons des pas résonner : c'est Sanka ! Son éternel air jovial s'assombrit quand il comprend ce qu'il s'est passé. Il court vers nous.

— Comment ?
— Harvey ! réponds-je. Ce lâche l'a frappé dans le dos.

Sanka serre les poings et les dents.

— Mais l'arbre est détruit, cherche-t-il le bon côté.
— Oui, mais trop tard : Arès doit être réveillé à l'heure actuelle.

Cette fois c'est Amalia qui a parlé. Je suis trop énervé pour répondre. Tous nos efforts pour empêcher le retour d'Arès réduits à néant à cause de ce fumier de Harvey ! Si un jour je le retrouve…

Mes rêves de vengeance sont stoppés par l'arrivée de Marie et Judith. Voir les deux femmes bien vivantes me réchauffe le cœur. Les yeux de Marie me fixent, et je remarque le sourire qu'elle a au bord des lèvres. La profondeur de son regard me fait fondre ; c'est la première fois depuis nos fiançailles que je lui fais face en chair et en os.

Sans que je ne l'aie prévu, elle saute sur moi et nos bouches se soudent. Surpris car je ne m'attendais pas à une telle audace de sa part, j'accueille ce contact tant espéré avec joie. Voilà de quoi me redonner de la vigueur !

Nos bouches de décollent. Marie recule d'un pas et me sourit béatement. Putain, je peine à y croire… Non seulement elle m'a embrassé, mais en plus elle a aimé. C'est dingue ! Je ne croyais plus ça possible. À voir la tête que tirent mes collègues, je ne suis pas le seul à être abasourdi. Amalia me fait les gros yeux tandis que la mâchoire de Sanka se décroche.

— Euh… il se passe quoi, là ? questionne Amalia. Elle a perdu la tête ou quoi ?
— Ouais, ça me troue le cul à coup de marteau-piqueur, renchérit Sanka.
— Je n'aurais pas dit mieux, ajoute Judith.
— Oh, mais arrêtez à la fin, vous tous. Ne soyez pas si coincés du cul : j'ai tout de même le droit d'embrasser mon fiancé, non ?
— Fiancé ? Hein ? s'étonne Amalia. Cette fois c'est sûr, il y a quelque chose qui cloche. Je suis plongée dans une illusion ou un truc de ce genre !
— Si c'est le cas, moi aussi. J'ai dû encore trop fumer : je ne vois que ça comme explication.
— Non, c'est la vérité : nous nous sommes fiancés tout à l'heure, confirmé-je.
— Oui, c'est vrai. Nous allons organiser notre mariage quand tout sera terminé. Vous serez tous invités, d'ailleurs. Je ne vous ai jamais aimés, mais ce n'est pas grave ; venez quand même !
— Tous invités ? Malheureusement, nous ne pourrons pas être tous présents, s'assombrit Sanka en désignant du doigt le cadavre encore chaud du Scorpion.
— Oh ! s'exclame Marie. Mince alors !

Vu le ton utilisé, elle n'en a pas grand-chose à faire. Elle a tenté de faire style qu'elle était touchée, mais sans être crédible du tout. Sérieusement, elle pourrait faire un effort tout de même… Je fronce des sourcils.

— Ben quoi ? comprend-elle. Je ne l'appréciais pas plus que les autres, d'autant plus qu'il a voulu faire de toi un sodomite. Et puis c'était un chevalier d'or : il savait à quoi il s'exposait, et il est mort en mission. C'est des choses qui arrivent, je ne vais pas chialer pour ça !

Les autres n'ont pas le temps de protester qu'un puissant cosmos se fait ressentir au loin. Une aura sombre et haineuse. Cette fois c'est sûr, Arès est bel et bien réveillé. Notre mission a échoué.

— Allez, en route, sourit la Vierge. Allons botter le cul de ce blasphémateur ! Et qu'on en finisse au plus vite : j'ai d'autres projets de prévus.
— C'est un dieu, tout de même… s'inquiète Sanka. Vous pensez que nous avons le niveau ? D'autant plus qu'il sera secondé par la déesse Aphrodite.
— Mais bien sûr que oui ! Ne faites pas vos fiottes ! Nous sommes chevaliers d'or, l'élite de la chevalerie. Nous avons écrasé les armées d'Aphrodite et d'Arès ; il ne nous reste plus qu'eux à abattre. On ne va pas s'arrêter en chemin !

Ouais, elle a raison : plus que deux dieux à vaincre, et tout sera fini. Le combat sera rude mais nous pouvons nous en sortir, d'autant plus que mon ancien maître m'a transmis une technique pour vaincre un dieu. Ça me sera très utile, même si j'ai promis de ne pas l'utiliser contre Aphrodite.
Nous repartons donc tous les cinq à l'assaut du palais d'Aphrodite, situé au centre du Jardin.

Plusieurs dizaines de minutes après, nous voilà face au palais. Le bouclier magique étant dissout grâce à la destruction des arbres, l'accès nous serait presque autorisé si une horde de chevaliers noirs et de gardiens d'Aphrodite ne se tenait pas devant nous.

— Qui disait qu'on avait détruit leur armée ? ironise Sanka.
— Ce n'est que du menu fretin. Nous allons les écraser en moins de deux. MALLEUS MALEFICARUM !
— EXPLOSION TELEKINETIQUE !
— ORBE INFERNAL !
— POSITIVE VIBRATION !

La puissance libérée par mes collègues est monstrueuse. Les fantassins ennemis sont réduits en charpie. Des fragments d'armures et des membres volent dans tous les sens. En face, beaucoup s'écroulent. D'autre, désintégrés, n'ont même pas cette chance. Les quelques survivants paniquent, et le plupart prennent la fuite. Nous chargeons les derniers chevaliers encore debout. Un coup de poing par ci, un coup de boule par là et les derniers déguerpissent. Cette fois nous entrons dans le palais.

Aphrodite se tient fière sur son trône. À côté d'elle, un autre trône a été installé ; il accueille Arès, au meilleur de sa forme. Les deux dieux ont revêtu leur armure, signe qu'ils comptent bien nous affronter. Celle d'Aphrodite, toute en courbes et aux couleurs pastel, est plutôt raffinée et met en valeur ses formes harmonieuses tandis que celle de son compagnon inspire la crainte et l'horreur avec sa couleur sombre et son aspect agressif. Armé d'un bouclier, un sourire sadique aux lèvres, Arès se lève à notre arrivée.

Mais d'autre se tiennent encore entre nous et les dieux : Hidden est là, dernier gardien d'Aphrodite. J'aperçois aussi un visage familier, celui de Sartienpa du Phénix Noir dont le regard traduit sa soif de vengeance. Deux autres chevaliers noirs les accompagnent : les Poissons Noirs et la Balance Noire, tous deux de sexe féminin. Et merde ! Nous qui pensions ne devoir affronter que les dieux allons devoir nous charger d'autres ennemis puissants. Arès ricane.

— Ne me dites pas que vous pensiez la victoire acquise, bande de minables ! Nous allons vous écrasez une bonne fois pour toutes.

J'avoue que s'ils s'y mettent tous en même temps, nous n'avons aucune chance de nous en sortir. Il nous faudrait un deus ex machina pour espérer faire le poids.

Comme s'il suffisait de le demander, nous entendons des pas lourds derrière nous. Nous nous retournons et avons le plaisir d'accueillir des renforts : notre déesse est venue en personne, escortée par le reste des chevaliers d'or. Mon cœur saute de joie et d'une foi renouvelée.

— Aphrodite, Arès, déclare Athéna vêtue de sa brillante armure, je suis venue vous mettre la fessée une bonne fois pour toutes !

Yeah ! Ça va déménager ! Surtout que notre chevalier des Gémeaux est en mode « Ayé » ; elle ne va pas faire de quartier, c'est sûr. Je n'en dirais pas autant du Maquereau qui semble le plus inquiet du groupe. Hâte de voir ce qu'il vaut vraiment et, s'il venait à mourir, je crois que je ne le pleurerais pas, celui-là. Hâte aussi de découvrir les pouvoirs d'Irma du Verseau.

— Dans tes rêves, Athéna ! crache Aphrodite. Si tu crois nous faire peur, tu te fourres…
— Toi la salope, tu fermes ta gueule ! Après tout ce que nous avons vécu ensemble, tu as osé me planter un couteau dans le dos ! Je vais te fesser en personne. Francis, toi et les autres, occupez-vous d'Arès. Irma, Emmanuello, Ayéfèmi, éliminez leurs derniers soldats !

Le Phénix Noir est la première à charger. Son attaque est très vite stoppée par le poing d'Ayéfèmi qui lui transperce la poitrine. Sartienpa hurle et disparaît dans un torrent de flammes.

— Méfie-toi ! lui hurlé-je. Elle n'est pas très puissante mais est immortelle ! Elle est plus casse-pieds qu'autre chose !

Les Gémeaux m'écoute à peine et lance une vague de cosmos sur Hidden qui préfère disparaître. Pas le temps de faire plus attention à leur combat, Marie charge notre ennemi, la fureur de son cosmos armant son poing. Arès ne sourcille pas. Il l'arrête d'un doigt. Il enchaîne par un brusque coup de poing dans l'estomac. Marie hurle de douleur et est projetée le long d'une colonne. Merde, j'ai à peine vu Arès bouger ; il a mis hors-jeu la plus puissante d'entre nous en un rien de temps. C'est donc ça, la puissance d'un dieu ?

— Racines de la terre ! hurle Amalia.

Des lianes surgissent du sol et ligotent notre ennemi. C'est le moment d'en profiter ! Je créé un orbe de mon Explosion Cataclysmique. Je charge en poussant mon cri de guerre. Judith et Sanka chargent à mes côtés. À le frapper tous les trois en même temps, nous avons une chance de lui faire du mal.

Au dernier moment, Arès arrache les lianes du sol comme si de rien n'était et évite sans difficulté nos attaques. D'un coup de paume sur le visage, Sanka est écarté. Judith prend un coup de genoux dans le bide. Quant à moi, Arès se contente de me faire chuter à terre d'un croche-pied. Je me ramasse comme une grosse merde. J'ai à peine le temps de réagir qu'un coup de pied me défonce les côtes. Je suis projeté contre un pilier.

— Miaiph?nos… murmure Arès.

Amalia hurle de douleur. Du sang se met à couler de ses yeux, de son nez, de sa bouche et de ses oreilles. Elle tombe à genoux.

Incroyable ! Comment pouvons-nous vaincre une entité comme lui ? Il est bien trop puissant. Nous peinons à suivre ses mouvements, et sa première attaque semble horrible. Est-ce possible de l'éliminer ?

— Illusion du Phénix Noir !

Un fil de cosmos traverse le cerveau d'Ayéfèmi qui se retrouve immobile un instant. Sartienpa apparaît dans un brasier noir, un sourire aux lèvres.

— Hé-hé, ne me sous-estimez pas, chevaliers d'or. Je vais tous vous réduire à néant. Vous ne me vaincrez pas si facilement. Je reviendrai toujours, même si je dois sacrifier des milliers de mes vies comme j'ai dû le faire pour me remettre de la flèche déicide du Sagittaire.

Le cosmos d'Ayé s'embrase. Elle est toujours immobile mais son énergie flamboie d'une puissance dingue. D'un coup, l'attaque du Phénix Noir est renvoyée à l'expéditeur. Sartienpa hurle de douleur et tombe à genoux. Plus loin, Aphrodite et Athéna semblent lancées dans un combat acharné. Elles s'insultent, se griffent, se tirent les cheveux et se mettent des gifles d'une puissance phénoménale. Emanuello et Irma se trouvent à devoir faire face aux chevaliers des Poissons Noirs et de la Balance Noire. Le Maquereau cherche plutôt à fuir les coups de ses adversaires. C'est donc Irma qui se retrouve à devoir affronter les deux ennemis au corps-à-corps.

Allez, j'ai encore un dieu à vaincre ! Il est temps de me relever, même si j'ai l'impression de m'être fait percuter par un troupeau de rhinocéros. Hâte de lui rendre la monnaie de sa pièce ; et pour ça, j'ai la technique parfaite.

— J'ai besoin d'un peu de temps ! déclaré-je à Marie. Il faut que vous occupiez Arès pendant que je prépare mon attaque.
— OK, compte sur nous ! Écoutez, chevaliers, rugit-elle. C'est le grand final ! Brûlez votre cosmos à votre paroxysme, dépassez vos limites et bottez-moi le cul de ce connard ! Qu'on en finisse une bonne fois pour toutes !

Et elle montre l'exemple. Ravi de voir qu'elle est encore bien en forme malgré le coup qu'elle a reçu précédemment. Son cosmos flamboie comme jamais. Toujours aussi impressionné par un telle puissance. La force de sa volonté encourage nos collègues : Sanka, Judith et Amalia se relèvent et font appel eux aussi au septième sens. L'atmosphère est lourde sous autant de puissance. On sent dans le sol les vibrations des cosmos déchaînés.

— Ha-ha-ha… ricane Arès. Vous pensez m'arrêtez avec si peu ? Vous n'êtes décidément qu'une bande de minables.

Il se tient droit, pas inquiet le moins du monde. Encore une fois, Marie est la première à charger. Elle frappe de toutes sa puissance mais le coup est stoppé net par le bouclier d'Arès. Cependant, la force de l'attaque l'a fait reculer d'un mètre environ. C'est encourageant, mieux que tout à l'heure. Amalia est la deuxième à charger. Arès contre-attaque mais le Lion évite le coup.

Bien, ça tourne mieux que tout à l'heure. Les filles semblent plus rapides et forcent Arès à danser avec elles. Sanka profite que le dieu soit occupé pour aller dans son dos et lui envoyer son attaque « Three Little Birds ». Son cosmos frappe l'ennemi par derrière mais sans lui causer le moindre dégât.

Bon, pas le temps de se tourner les pouces. Moi aussi je dois me dépasser. Je concentre mon cosmos. Il est temps de mettre fin à cette guerre pour Athéna, pour le monde et pour mon futur mariage avec Marie. Je pousse mon cri de guerre et déchaîne mon cosmos. Les bras levés en l'air, je projette mon énergie vers le ciel. Elle file et transperce le toit du palais. Je sens déjà l'atmosphère tourner à l'orage. Problème, ma visibilité sur le ciel est trop limitée pour savoir parfaitement ce que je fais.

— Judith ! hurlé-je. J'ai besoin d'une vue sur le ciel !

Le message est passé. Le Capricorne déchaîne ses pouvoirs télékinétiques et arrache la lourde toiture morceau par morceau. Elle envoie le tout sur le dieu de la Guerre qui se fait écraser par les lourds décombres dans un vacarme assourdissant. Voilà, la vue est dégagée : je peux maintenant voir un peu plus ce que je fais.

— Brotoloig?s !

Une énorme explosion retentit. Les débris sont projetés tout autour d'Arès. Marie, Amalia et Sanka se prennent le souffle de l'explosion. Les trois chevaliers s'écrasent lourdement sur le sol. Judith résiste grâce à son bouclier cosmique. Quant à moi, je suis trop éloigné pour subir le contrecoup de l'attaque.

— Je suis le fléau des hommes ! Pensez-vous vraiment que vous auriez fait le poids contre moi ?

Qu'il attende que je lui foute mon Gae Bolga dans la gueule, et on verra bien… Il me faut déjà invoquer la foudre. C'est d'ailleurs bientôt prêt. C'est pile le moment où le regard du dieu se pose sur moi.

— Me prends-tu pour un idiot ? Je sais ce que tu prépares, et je ne vais pas te laisser arriver à tes fins !

Il craint donc mon Gae Bolga : c'est bon à savoir. Il s'avance à pas lourds vers moi. Un cosmos qui sent la mort et la destruction s'échappe de lui. Sa route est cependant coupée par une Judith déterminée.

— Il faudra d'abord me passer sur le corps.
— Et sur le mien !

Amalia a trouvé la force de se relever et rejoint le Capricorne pour faire barrage à Arès. Un sourire sadique s'affiche sur les lèvres du dieu de la guerre et son poing s'écrase contre la poitrine d'Amalia qui, cependant, absorbe le coup. Arès semble très étonné. Bon, pas de temps à perdre, je dois invoquer la foudre au plus vite.

— GAE BOLGA !

Pendant ce temps, les autres combats se poursuivent. Ayéfèmi a invoqué des poupées à l'effigie des Poissons Noirs et joue avec, permettant à Irma et Emmanuello de respirer un peu plus contre la Balance Noire.

— Par les flammes du Phénix Noir !

L'oiseau de flammes noires s'abat dans le dos des Gémeaux. L'attaque est trop faible pour provoquer de véritables dommages à ma collègue, mais elle lui fait cependant voler son casque et lâcher la poupée, libérant ainsi le chevalier noir de son emprise. Ayé se tourne vers Sartienpa, le regard agacé.

— Tu commences à m'énerver. Dans d'autres conditions, tu aurais fait un jouet formidable car incassable ; mais là, ton immortalité me gêne plus qu'autre chose.

Les deux femmes se font face et embrasent leur cosmos. Il y a une nette différence en faveur du chevalier d'or. Elle ne craint pas grand-chose, mais comment compte-t-elle contrer l'immortalité du Phénix Noir ?

Les deux femmes chargent l'une vers l'autre, le poing en avant. L'onde de choc de leur collision est terrible. Sartienpa hurle de douleur avant d'être désintégrée une nouvelle fois. Elle est morte, mais elle reviendra d'ici peu.

— Baron Samedi, laisse-moi t'invoquer. J'ai envoyé une âme impie vers ton royaume. Toi, le gardien de l'au-delà, je te prie de la garder près de toi et de lui refuser de revenir vers le monde des vivants.

Son cosmos danse frénétiquement puis se calme soudain. Un instant j'ai cru entendre un rire sombre résonner dans tout le palais. Sartienpa est-elle définitivement vaincue ? Sans doute : Ayé semble sûre d'elle.

Le chevalier des Gémeaux avance de nouveau vers les deux derniers chevaliers noirs quand soudain son corps se met à trembler. Inquiète, elle pose un genou à terre.

— Non… souffle-t-elle. Pas maintenant… Fèmi, laisse-moi encore un peu de temps…

Mais rien à faire : sa chevelure vire soudain au rose. Merde ! Ce n'est pas le moment d'avoir un chevalier des Gémeaux qui refuse de se battre. Fèmi ne nous est d'aucune utilité !

Du côté des déesses, le combat fait encore rage. Visiblement, c'est Athéna qui le domine. Aphrodite peine à suivre le rythme que lui oppose la déesse de la guerre et de la sagesse. Elle perd peu à peu du terrain. C'est plutôt une bonne chose. Par contre, méfiance : connaissant mon ancienne déesse, je sais qu'elle n'abandonnera pas aussi facilement ; elle sait se montrer rusée.

— Rends-toi, Aphrodite ! En l'honneur de notre amitié passée, j'accepterai de t'accorder la vie sauve, mais tu dois abandonner Arès.
— Jamais, Athéna ! Il est mon âme-sœur, mon grand amour ! Je le suivrai jusqu'au bout !
— L'amour te rend aveugle. Tu crois vraiment avoir un avenir avec lui ? Arès ne vit que pour le carnage et la destruction. Tu n'as aucun futur avec lui.
— Tu te trompes : Arès m'aime vraiment et ne souhaite que créer un monde à notre image afin que nous puissions guider l'humanité grâce à l'amour qui nous unit.

Athéna explose de rire. Aphrodite boude.

— Par les charmes divins d'Aphrodite !

Son cosmos flambloie. Elle envoie une vague d'énergie sur Athéna qui la repousse sans trop de difficultés.

— C'est inutile ! Si tu crois que tu vas réussir à m'enchanter avec une technique aussi faible, c'est que tu es bien naïve.
— Je pouvais toujours tenter le coup. Que pouvais-je faire d'autre ? Déjà en temps normal tu me domines sur le champ de bataille, mais là tes chevaliers m'ont affaiblie en rasant tous mes arbres sacrés.
— Ce que tu pouvais faire d'autre ? Te rendre !
— Tss, tu lâches jamais l'affaire ?
— Très bien, comme tu veux. Par l'Égide d'Athéna !

Notre déesse met son bouclier en avant qui s'éclaire d'une luminescence aveuglante. Un puissant rayon d'énergie est projeté sur la déesse de l'Amour qui ne parvient pas à repousser l'attaque. Elle se la mange en pleine poire. La déesse est renversée comme un fétu de paille. Tout essoufflée, elle se relève difficilement après plusieurs secondes. Son armure divine est fêlée de partout.

— Putain, mon armure…
— Eh oui, sourit Athéna, l'Égide est une puissante attaque, autant défensive qu'offensive. Tu ne pourras la contrer et ne résisteras pas bien longtemps. Il est encore temps de te rendre.

Athéna s'avance vers son ancienne amie, une main tendue en signe de paix. Elle s'arrête. Non, elle se retrouve bloquée : quelque chose cloche et l'empêche de bouger. Elle gonfle son cosmos pour tenter de se libérer.

— Maintenant, Hidden ! hurle Aphrodite. Termine le sceau !

Hidden, gardien forestier de la Lune Cachée, apparaît près de ma déesse. D'un coup rapide il s'écorche la paume. Un filet de sang s'écoule sur le sol.

— Par le Sceau Secret de l'Éternité !
— Par les racines de la vie ! complète Aphrodite.

Une forme rouge complexe, centrée sur les pieds d'Athéna, apparaît sur le sol tandis que des racines sortent et la ligotent. La déesse de la guerre et de la sagesse panique et se débat, mais rapidement elle se retrouve paralysée. Le sceau invoqué par Hidden enferme le tout dans une sorte de cristal cosmique.

— Ha-ha-ha ! s'esclaffe Aphrodite. Comme tu vois, ma chère, je n'avais pas dit mon dernier mot. Te voilà maintenant prisonnière du sceau indestructible de Hidden tandis que mes racines de la vie pompent ton cosmos afin de faire renaître mes arbres sacrés. Dans quelques instants, tu seras morte et mon Jardin retrouvera sa splendeur d'antan !

La situation se corse. Athéna, mise hors-jeu, va nous pénaliser. Il nous faut vaincre Arès rapidement pour sauver notre déesse avant qu'il ne soit trop tard. Ma lance-foudre est quasiment prête. Amalia et Judith ont réussi jusque là à tenir tête au dieu de la guerre grâce à leurs pouvoirs spéciaux.

— Impressionnant, reconnaît Arès. J'imaginais pas que des chevaliers d'or pourraient me tenir tête si longtemps. Je dois admettre que vous m'avez bien diverti. Cependant, les choses ont assez duré ; il est temps de vous montrer ce que « brutal » signifie vraiment. MALERÓS !

Son cosmos virevolte tout autour de lui et une aura de mort entoure son poing. Un sourire sadique s'empare de ses lèvres. Il charge Judith qui se protège grâce à son bouclier psychique, mais la puissance de l'attaque d'Arès fait voler en éclat sa protection. Judith hurle de douleur, valdingue et s'écrase contre un mur. Amalia lance une boule infernale pour tenter d'arrêter la bête, mais le dieu la dévie d'un coup de bouclier. En un éclair, il est sur elle et lui balance un crochet dans la poitrine. Le Lion crache du sang et valdingue elle aussi. Même l'énergie qu'elle puise dans le sol n'a pas été suffisante pour la protéger du coup d'Arès. Dingue !

Le Lion et le Capricorne sont donc à terre mais les filles m'ont suffisamment fait gagner de temps. Je charge notre ennemi, la lance-foudre en avant. Inquiet, Arès m'envoie une vague d'énergie pour me repousser mais la puissance de ma détermination est suffisante pour résister au pouvoir du dieu. Plus qu'un pas. Je pousse mon cri de guerre et frappe.

— NON ! hurle Arès.

Le cruel dieu gonfle son cosmos pour résister à l'attaque, mais c'est inutile : la foudre s'abat quand même sur lui. J'entends le craquement d'une armure et des crépitements. Le plasma se déchaîne. Un flash lumineux m'aveugle. L'onde de choc nous projette loin l'un de l'autre. Je me ramasse par terre.

Sonné, je me relève cependant et découvre mon ennemi toujours debout. Quoi ? Impossible ! Pierheim m'avait affirmé que cette technique était efficace contre un dieu, mais il est toujours vivant. Serait-il donc imbattable ?

Non, il a survécu grâce au bouclier de son armure. C'est lui qui a retenu mon Gae Bolga. Cependant, il a été pulvérisé dans la manœuvre, ainsi qu'une la partie de l'avant-bras de son armure. Une mince filet de sang s'écoule de son poing, mais à part ça pas d'autres dégâts. En revanche, je semble l'avoir mis dans une colère noire ; son cosmos bout de rage. La puissance de sa fureur m'écrase les épaules. Je suis comme engourdi par la terreur.

— Toi, tu vas me le payer, misérable ver de terre !

Il s'avance vers moi. Paralysé par son cosmos, il m'est impossible de fuir. J'ai beau faire appel au mien, je ne peux lutter contre une telle puissance. Une main m'enserre le cou et me soulève comme une vulgaire plume. Il m'étrangle. Ma gorge me brûle. L'oxygène commence à me manquer. Ma vue se brouille. Cette fois, c'est la fin.
J'ai cru pouvoir m'opposer à un dieu ; j'ai été bien idiot. Adieu…