Que suis-je ?
Lioubov25/04/2017Tout a commencé à ma naissance, il y a déjà 37 ans. Lorsque la sage-femme me posa, encore tout gluant, sur le ventre de ma mère en lui annonçant qu'elle venait de mettre au monde un beau garçon, ses sourcils se froncèrent. Elle s'approcha de moi pour m'examiner avec minutie.
— Madame, je suis allée peut-être un peu vite en vous disant que vous veniez de donner naissance à un beau garçon. Indéniablement, c'est un garçon : il en possède tous les attributs mais… c'est aussi une fille. Je savais que cela se produit parfois, mais c'est la première fois que je vois un cas comme celui-ci. C'est extrêmement rare ; cette particularité est dénommée hermaphrodisme.
Ainsi donc, j'étais un cas… Mes parents me déclarèrent à l'état civil comme étant de sexe masculin, mais avec un prénom asexué : Claude. Combien de fois m'ont-ils emmené en consultation chez des spécialistes de renom ? Mais ils obtenaient toujours la même réponse : il leur fallait choisir entre l'un et l'autre sexe. Et, lorsque leur choix serait fait, une intervention chirurgicale – suivie de longs traitements à base d'hormones – me ferait acquérir les caractéristiques d'un seul sexe, au détriment de l'autre : mais ce choix serait définitif, irréversible.
Fort heureusement, mes parents ne voulurent rien m'imposer avant que je sois en âge de choisir moi-même si je voulais devenir une fille ou un garçon. En attendant, ils m'élevèrent comme si j'étais un garçon, puisque c'est cet aspect de mon sexe qui était le plus apparent.
Vers le début de mon adolescence, la curiosité me poussa à explorer mon anatomie intime. Lorsque mes parents me laissaient seul à la maison, je m'enfermais dans la salle de bain et, accroupi au-dessus d'un miroir posé à plat sur le carrelage, je prenais plaisir à observer la configuration particulière de mes organes sexuels. J'avais une verge qui – bien qu'encore assez petite – se développait depuis quelques années ; ce n'était déjà plus un zizi de gamin. Mais juste en dessous, à sa base, une fente se cachait derrière l'espèce de sac qui contenait mes petites boules.
J'avais remarqué que, lors de ma toilette, le passage du gant sur cette fente me procurait une chaleur diffuse dans le ventre ; c'est pourquoi j'avais l'habitude d'insister tout particulièrement sur cet endroit pour ressentir ce trouble qui m'intriguait. Mais, ce jour-là, accroupi au-dessus du miroir, je décidai de me passer du gant et de frotter directement ma petite fente avec mes doigts. La sensation était encore meilleure qu'avec la pièce de tissu… Plus je grattais cet endroit-là, plus il me démangeait. Ma fente s'ouvrait sous le frottement acharné de mes doigts qui se mirent à glisser. Le miroir me renvoya l'image d'une sorte de bouche dont les lèvres étaient rendues brillantes par le liquide qui s'en écoulait. Cette vision m'inquiéta ; j'arrêtai de m'astiquer la fente, même si mon corps me demandait de continuer.
Parfois, ma verge me surprenait en devenant toute dure. Lorsque j'en parlai à mes copains, ils m'apprirent – en se moquant de ma naïveté – que je « bandais », et ils me demandèrent si je me « branlais ». Je n'avais jamais entendu parler de ça… Ils me dirent alors comment faire pour qu'elle gicle en me donnant du plaisir ; ils nommaient cela « décharger ». Ils me donnèrent envie d'essayer de le faire. Dès qu'il me fut possible de me retrouver seul, après m'être enfermé dans la salle de bain je suivis les explications de mes copains pour essayer de me « branler ». Je « bandais » déjà, rien qu'en pensant au plaisir que j'allais connaître…
J'entourai ma verge de mon pouce et de mon index, créant ainsi une sorte de bague que je fis coulisser d'avant en arrière le long de mon petit membre, qui devint encore plus rigide. Je ressentis une sorte d'agréable picotement à son extrémité (mes copains appelaient cette partie le « gland »). Ces mêmes copains m'avaient dit que pour bien « se branler », il fallait tirer en arrière la peau qui le recouvre pour le dégager. J'essayai de le faire, mais l'ouverture de cette peau était trop étroite pour que je puisse me « décalotter », comme ils disaient ; je ne pouvais découvrir mon petit gland que sur une longueur d'un centimètre environ, mais sans pouvoir aller plus loin.
Pourtant, j'étais tellement excité que je voulus faire comme les grands, pour me « branler » aussi bien qu'eux. Je me mis à tirer de plus en plus fort sur ma petite peau et, tout à coup, je ressentis une vive brûlure : mon gland apparut entièrement, totalement dégagé de son enveloppe protectrice. J'avais réussi ! Ma peau s'était resserrée derrière mon gland et le faisait gonfler ; sa surface satinée prit une couleur de plus en plus sombre, passant du rose pâle pour atteindre une teinte violet foncé, et je pouvais voir une goutte de liquide transparent perler à son extrémité.
Je repris mes mouvements alternatifs le long de ma petite bite, ce qui me fit éprouver des sensations voluptueuses, accompagnées d'une tension interne qui se faisait de plus en plus importante, aussi bien dans mon bassin que dans mes jambes qui se mirent à trembler. Je continuai à caresser ma verge jusqu'à ce que de violentes contractions de tout mon corps me fassent expulser avec force quelques jets d'un liquide blanchâtre et épais qui atterrirent sur le carrelage de la salle de bain tandis qu'un plaisir immense montait du creux de mes reins pour venir exploser sous mon crâne. Je crus m'évanouir, tellement c'était fort. C'était donc ça, jouir…
Depuis cette expérience, je me suis branlé souvent – très souvent même – pendant quelques années. Ma verge s'était considérablement allongée, et elle me procurait des jouissances inexprimables. Cependant, je conservais au fond de moi le souvenir de ce trouble qui m'avait envahi lorsque je m'étais frotté la fente, sans toutefois atteindre l'orgasme que je sentais venir. Je sentais confusément qu'un plaisir encore plus grand que celui que m'apportaient mes branlettes était possible en combinant des caresses sur ma bite (qui était devenue assez longue pour que je puisse l'appeler ainsi) avec d'autres sur ma fente. Je résolus de tenter une nouvelle expérience.
Courbant ma bite vers le bas, j'amenai mon gland préalablement décalotté au contact de ma fente, que j'avais caressée pour la rendre humide. Cet attouchement me fit instantanément éprouver un frisson de plaisir. Je commençai à frotter mon gland entre ces lèvres qui s'écartaient sur son passage ; et comme le liquide visqueux qui s'en écoulait favorisait le glissement, mon gland s'introduisait de plus en plus profondément entre les replis de chair palpitante. Il s'immisçait dans une chaleur moite, douce comme du velours, qui l'enrobait de toute part en le pressant voluptueusement… Le plaisir naissant augmenta mon désir de m'enfoncer encore plus loin dans ce doux fourreau. Je me levai du canapé pour m'asseoir sur un support plus ferme, une chaise en l'occurrence. Dans cette position, le poids de mon corps exerçait une pression suffisante pour permettre à ma verge de pénétrer plus profondément pour découvrir des endroits encore inexplorés de mon anatomie.
Je ressentis une légère douleur lorsque mon gland franchit une barrière qui faisait obstacle à sa progression, mais ce désagrément fut largement compensé par le plaisir qui s'ensuivit presque immédiatement. Ma verge, recourbée, coulissait en moi en me procurant d'ineffables sensations ; mais peut-être que mon plaisir provenait également du soyeux fourreau qui la compressait… Je ne pouvais pas déterminer avec précision l'origine de ces délicieuses sensations qui m'emportaient de plus en plus loin. Assis sur cette chaise, j'étais en proie à des soubresauts qui enfonçaient encore et encore ma bite dans mon vagin. C'est alors qu'une vague de jouissance me submergea, me faisant longuement hurler de plaisir et je retombai, anéanti, sur mon siège.
Par la suite, ce ne fut qu'en de très rares occasions que je me branlai, préférant le plaisir extraordinaire de me baiser moi-même. C'est pour cette raison que je décidai de ne pas opter pour un seul sexe, au détriment de l'autre. Mon apparence extérieure restait celle d'un garçon mais, entre mes cuisses, se nichait une vulve qui – bien que dépourvue de clitoris – se gonflait sous l'effet du désir en laissant s'écouler un fluide visqueux. Comme je possédais à la fois des organes mâle et femelle, je me satisfaisais moi-même ; du coup, je ne recherchais pas d'autres partenaires, de quelque sexe qu'ils fussent.
J'étais tellement obnubilé par le plaisir intense que je me donnais que j'en négligeai quelque peu mes études. Une fois le bac en poche, je ne m'inscrivis pas à la fac. Je trouvai un job d'aide-comptable qui me permit de vivre chichement pendant quelques années jusqu'à ce que la boîte pour laquelle je travaillais soit rachetée par une multinationale. Au cours de la restructuration qui s'ensuivit, je perdis mon emploi et me retrouvai au chômage, obligé d'aller pointer aux ASSEDIC. La crise qui était née en même temps que moi était toujours là, et même bien là ! Je n'arrivais pas à retrouver de travail stable. Le temps passait ; désœuvré, je fréquentais de plus en plus les bars pour penser à autre chose qu'à ma déprime croissante.
Peu avant la fin de ma période d'indemnisation, dans un bar situé non loin de la rue St-Denis, un homme avec qui je discutais un soir, accoudé au comptoir, me proposa de travailler dans son établissement, un club un peu spécial où des couples faisaient l'amour dans de vastes filets accrochés en hauteur au-dessus des clients.
— T'es beau gosse ; tu devrais plaire à ma clientèle. Tu verras, c'est bien payé. T'as besoin de fric ; alors, baiser en étant payé, c'est pas le pied ?
J'hésitais, car le fait de me donner en spectacle m'inquiétait ; mais, pensant aux factures impayées qui s'accumulaient dans mon studio, je lui donnai mon accord.
— Alors suis-moi ; je vais te montrer où c'est.
Je le suivis jusqu'à la rue St-Denis, où il me fit entrer dans un petit boui-boui sordide.
— Viens dans mon bureau.
Croyant qu'il allait me faire signer un contrat d'embauche, je le suivis sans méfiance dans un réduit lépreux.
— Allez, baisse ton froc : il faut que je vérifie la marchandise.
— Mais…
— Tu veux bosser, oui ou non ?
Vaincu par cet argument massue, je défis les attaches de mon pantalon, qui glissa jusqu'à mes genoux.
— Le slip, aussi.
Je m'exécutai.
— Ouais… C'est pas mal. Essaie de bander, pour voir ce que ça donne, si ça va plaire aux clients.
Bien entendu, il m'était impossible d'avoir une érection dans ces conditions.
— Tu peux pas bander ? Attends, je sais quoi faire.
L'homme s'agenouilla devant moi et saisit ma verge pour se l'introduire dans la bouche. Il se mit à me sucer tout en faisant aller sa main le long de ma hampe qui durcit en s'allongeant. J'étais très gêné de me faire sucer par un homme (j'allais, par mégarde, dire « par quelqu'un du même sexe que le mien »…) mais j'appréciais les caresses qu'il me prodiguait. C'est alors qu'il empauma mon scrotum et fit courir ses doigts sur la tendre peau.
— Putain !… Mais qu'est-ce que c'est que ça ? T'es un mec ou une nana ?
Il venait, sans s'en apercevoir, d'introduire une phalange dans ma fente qui bavait.
— Merde alors… Une chatte ! Une chatte et une bite ! Mais qu'est-ce que t'es ?
— Je ne sais pas… Je suis né comme ça. Les médecins disent que je suis hermaphrodite.
Du coup, il s'était arrêté de me sucer. Je restais planté là, comme un imbécile, le pantalon en bas des genoux et la bite à l'air.
— On va gagner un max de fric, tous les deux ! Je connais des gens pleins de blé qui vont en claquer pour toi…
C'est ainsi que débuta ma carrière de phénomène sexuel. Certes, le boui-boui sordide de mon imprésario-maquereau était loin : je ne fréquentais que des membres de la jet-set et résidais dans des demeures somptueuses, passant de l'une à l'autre tout autour du globe. J'étais leur jouet adulé. Jouet, oui ; mais jouet sexuel… Tout ce beau monde usait et abusait de mon corps : quoi de plus excitant pour ces individus blasés que de découvrir un être androgyne, mâle et femelle à la fois, capable de réaliser leurs pires turpitudes ? J'ai connu des moments de pur délire, me soumettant à des accouplements que j'aurais crus impossibles, comme cette soirée au cours de laquelle je m'étais retrouvé avec une bite dans la chatte et une autre dans le cul tandis qu'une transsexuelle me suçait la verge tout en se faisant sucer sa propre verge par une magnifique jeune femme !
Je me dégoûtais…
En quelques années j'avais amassé un gain considérable, largement suffisant pour me mettre à l'abri du besoin jusqu'à la fin de mes jours. J'arrêtai mes frasques et revins en France, où je fis l'acquisition d'une villa sur la côte méditerranéenne. Je menais une existence oisive ; mais je me sentais tellement seul…
Je me remis à fréquenter les bars, mais des bars d'une tout autre classe : ceux des palaces. C'est là, un soir où je traînais mon ennui, que je remarquai une superbe jeune femme blonde aux yeux émeraude, à la silhouette élancée mais dotée de seins généreux et haut-placés, et d'une croupe rebondie et bien cambrée. Elle était assise sur l'un des hauts tabourets de bar, non loin de moi. Sa courte jupe en lamé, fendue sur le côté, dévoilait des cuisses fuselées et nerveuses. Elle était merveilleuse ! Je fus instantanément subjugué par sa beauté.
— Comment se fait-il qu'une femme aussi charmante que vous ne soit pas accompagnée ? Vous devriez avoir à vos pieds une nuée de chevaliers servants… Permettez-moi de vous offrir une flûte.
— J'accepte avec plaisir. Je me prénomme Valérie.
— Enchanté, Valérie ; moi, c'est Claude.
Nous sympathisâmes immédiatement ; nous avions devisé longuement de choses et d'autres lorsque je réalisai que la nuit s'était installée et que mon estomac se rappelait à mon souvenir.
— Il se fait tard, Valérie. Puis-je vous inviter à dîner ? Je me suis laissé dire que le restaurant de cet établissement est tout à fait convenable. Qu'en dites-vous ?
— J'ai un petit coup de blues… Je n'ai pas envie de dîner seule.
Le repas se déroula comme dans un rêve. Les confidences que nous avions échangées dans ce cadre raffiné avaient rapproché nos solitudes. Ma main osa se poser sur la sienne ; elle ne la retira pas…
— Allons prendre les liqueurs au salon, si vous le voulez bien.
Main dans la main, je l'amenai dans une confortable pièce à laquelle l'éclairage tamisé conférait une chaleureuse intimité ; nous nous installâmes dans de profonds fauteuils recouverts de cuir beige. Après avoir passé commande, je laissai mon regard errer autour de moi. Dans un angle, au clavier d'un superbe Steinway Grand Concert laqué de blanc, un pianiste interprétait la mélodie apaisante du Köln Concert de Keith Jarrett. Juste à côté du coûteux instrument trônait un orgue Hammond, un B3 équipé d'une volumineuse enceinte Leslie à haut-parleurs rotatifs.
Dans ce cadre raffiné, nous dégustions nos liqueurs (curieusement, nous avions tous deux opté pour de la Chartreuse verte) en échangeant des regards qui en disaient long…
Ayant fini d'égrener les dernières notes du Köln Concert, le musicien s'installa aux claviers de l'orgue (les orgues Hammond possèdent deux claviers superposés et légèrement décalés). Tournant à basse vitesse, les pavillons du Leslie commencèrent à diffuser quelques accords. « Do majeur, Mi mineur, La mineur… » : mon oreille avertie reconnut immédiatement ce tube de 1967, A Whiter Shade of Pale. La voix du musicien s'éleva au-dessus des accords : « We skipped a light fandango, turned cartwheels 'round the floor… » L'occasion de tenir Valérie dans mes bras était trop belle pour que je la laisse échapper ; déjà, des couples avaient rejoint la petite piste de danse.
— Faisons comme eux… lui proposai-je.
Elle m'adressa un sourire radieux et m'accompagna sur la piste. Je ne pus réprimer un frisson lorsque nos corps se trouvèrent en contact pour la première fois. Cette fille me fascinait… Sans réfléchir, elle avait instinctivement passé ses bras autour de mon cou ; son délicieux visage s'était posé sur mon épaule et je humais les effluves de son eau de toilette, Chloé. Mes mains remontèrent de ses hanches jusqu'à ses fines épaules pour l'enserrer encore plus. Son corps souple et chaud ondulait contre le mien ; j'avais l'impression que mes pieds ne touchaient plus le sol et que nous flottions en apesanteur…
Glissando sur les touches du Hammond ; pavillons du Leslie à pleine vitesse, qui vrombirent… « And so, it was that later, as the miller told his tale, that her face at first just ghostly, turned a whiter shade of pale… » Sans nous être concertés, nos regards se vrillèrent l'un à l'autre ; ses lèvres tremblaient lorsqu'elle ouvrit sa bouche en la rapprochant de la mienne… Contact ! Décharge électrique foudroyante ! Fusion… Sa douce langue caressait délicatement mes lèvres frémissantes puis, se faisant pointue, elle s'insinua entre elles. Je me mis à sucer et à aspirer la pointe de la langue coquine qu'elle dardait entre mes lèvres, puis nous échangeâmes un long baiser, langoureux, torride…
Bien entendu, réagissant à ce baiser embrasé, ma verge prit de l'ampleur ; cela ne sembla pas offusquer la belle qui, loin de fuir cette rigidité, pressa son ventre contre le mien. Ce n'est qu'après plusieurs secondes que je m'aperçus de quelque chose de bizarre : mon membre était en contact avec quelque chose de dur, qui semblait se développer. Son bassin se décolla du mien. Valérie vint me susurrer à l'oreille :
— Oh, Claude… Ne m'en veux pas. Je voudrais tant que ça se passe bien avec toi…
— Qu'as-tu, Valérie ?
— Je dois t'avouer quelque chose avant que ça n'aille trop loin, toi et moi. Mais pas ici.
— Je dois avoir du champagne au frais, chez moi. Veux-tu m'y accompagner ?
— Je pense que le cadre sera plus propice aux confidences qu'un endroit public.
— Alors allons-y !
Le long capot de mon coupé Jaguar E-type reflétait les lueurs de la lune tandis que nous roulions sur la corniche. Une de mes mains caressait une cuisse gainée de soie.
— Ne crains rien, ma douce Valérie ; bientôt, tu pourras tout me dire… D'ailleurs, nous arrivons.
Une détonation se fit entendre lorsque le bouchon fusa avec force de la bouteille de Cuvée Dom Pérignon que je débouchais. Après avoir rempli deux flûtes, je m'installai aux côtés de Valérie et, passant un bras autour de ses épaules, je l'attirai contre moi. J'éteignis la lampe, ne laissant qu'une bougie pour nous éclairer. Elle hésita longuement avant de prendre la parole.
— Tu sais, Claude, jusqu'à présent je n'ai connu que des déboires avec les hommes.
— Peut-être parce que tu es trop belle, et qu'ils se sentent diminués par rapport à toi. Ou alors parce que ta beauté les impressionne trop pour qu'ils osent se déclarer.
— Non, il ne s'agit pas de ça : j'ai eu beaucoup d'aventures, mais aucune n'a duré lorsque que mes amants ont découvert ma particularité. Je préfère t'en aviser tout de suite avant que nous n'allions plus loin.
— De quoi veux-tu parler, Valérie ? Je ne comprends pas…
— Voilà. Mes parents ne savaient pas quel prénom me donner : Valérie, ou Valéry ?
— Valérie ou Valérie ? Mais c'est exactement pareil !
— Lorsque tu l'entends, peut-être ; mais pas lorsque tu l'écris…
Elle tentait de me mettre sur la voie, mais sans trop m'en révéler.
— Pour moi, tu es et tu resteras Valérie, quelle que soit la façon de l'écrire. Ce n'est pas une stupide question d'orthographe qui pourrait changer les sentiments que j'ai pour toi ! Je ne te l'ai pas encore dit, mais je tiens énormément à toi, même si notre rencontre ne date que de quelques heures. Je crois qu'on appelle cela un coup de foudre ; j'en avais entendu parler, mais sans l'avoir jamais éprouvé.
— Tu sais, Claude, je ressens la même chose pour toi… C'est pourquoi je ne veux pas te décevoir si cette histoire naissante devait se terminer en queue de poisson, comme toutes les autres auparavant.
— Comment pourrais-tu me décevoir, alors que je te désire plus que tout ?
Elle griffonna nerveusement quelque chose sur une feuille de papier.
— Tiens ! Regarde !
Valérie / Valéry
Je me rappelai la rigidité que j'avais sentie contre mon ventre en dansant avec elle…
— Tu serais un travesti ?
— Non, Claude : je ne suis pas un homme qui a les apparences d'une femme. C'est beaucoup plus compliqué que ça : je suis femme et homme à la fois. Je suis née comme ça. Voilà, tu sais ; maintenant, à toi de décider.
Elle éclata en sanglots. Je la serrai très fort contre moi et, lui relevant le menton, je lui donnai un long baiser en guise de réponse. Ses pleurs redoublèrent d'intensité, puis se calmèrent quelque peu ; elle posa sur moi un regard interrogateur, les yeux encore embués de larmes.
— Alors, tu m'acceptes telle que je suis ?
— Oui, ma chérie ; et d'autant plus que je suis dans le même cas que toi… N'as-tu pas remarqué que Claude est un prénom qui peut s'appliquer aussi bien aux hommes qu'aux femmes ? Alors, buvons à nos amours !
Ses yeux pétillaient autant que les fines bulles du champagne.
— Oh, Claude, c'est incroyable ! Je croyais être la seule dans mon genre… Toi aussi ? Mais c'est merveilleux ! J'ai envie de toi, là, tout de suite !
Elle se jeta sur moi, déchaînée. Nos vêtements volèrent à travers le salon et nous nous retrouvâmes nus. Elle était vraiment magnifique, avec ses seins haut plantés et son beau petit cul bien cambré. Et sur ce corps féminin parfait, incongrue, une verge de taille respectable s'érigeait au bas de son ventre.
— Hmm… Quel clito magnifique !
Ses mains s'emparèrent de ma verge et partirent à la découverte de ce qui me distinguait des autres hommes. Valérie découvrit ma vulve ruisselante.
— Et toi, quelle chatte tu as… Je vais te la bouffer !
Elle s'agenouilla devant moi et entreprit une fellation mêlée de cunnilingus, passant sans relâche de mon membre masculin à mon organe féminin ; puis nous roulâmes rapidement sur le tapis, tête-bêche, afin que je puisse lui prodiguer les mêmes caresses que les siennes.
— Viens en moi, maintenant.
— Je pourrais te dire la même chose, Valérie…
Je commençai par lui faire l'amour de façon normale, ma verge dans son vagin, mais en lui caressant tendrement son phallus bandé. De son côté, elle ne restait pas inactive : elle effleurait les lèvres de ma vulve puis introduisit deux doigts dans mon propre vagin. Cette intromission éveilla en moi d'autres désirs.
— Baise-moi, Valérie ; viens en moi…
— Mais je n'ai jamais fait ça, Claude !
— Essaie quand même, je t'en prie…
Reculant son bassin afin de se dégager de mon étreinte, elle pointa son gland gorgé de sang sur ma vulve et, après l'avoir fait glisser entre mes lèvres pour lubrifier sa verge, elle me l'introduisit doucement mais profondément dans le vagin. Je ressentis un plaisir particulier lorsque mes chairs intimes s'écartèrent sous la poussée de son gland. Elle commença alors de tendres mouvements de va-et-vient à l'intérieur de mon ventre.
— Oh, Claude, c'est tellement bon de faire l'amour comme un homme…
— Je pense que nous pourrions tirer encore plus de plaisir de nos corps, Valérie : mettons-nous dans la même position que tout à l'heure, tête-bêche.
Elle se positionna comme je le lui avais demandé.
— Maintenant, mon amour, nous allons pouvoir nous pénétrer mutuellement.
Nos verges s'insérèrent dans nos vagins ; certes, la position requise n'était pas très confortable, mais le plaisir inouï – pénétrer tout en étant pénétré – que nous en retirions compensait cet inconvénient. Nos corps, profondément enchâssés l'un dans l'autre, s'agitaient frénétiquement ; la jouissance montait… Enfin, elle nous submergea tous deux au même instant.
— Je t'aime… Aaaah… Je t'aime, Valérie !
— Ooooh ! Claude, mon amour ! Je t'aime tant…
Nos sexes se séparèrent pour nous permettre de nous serrer l'un contre l'autre, unis par un baiser passionné.
Notre union dure depuis trois ans, à présent ; nous savons qu'elle perdurera.
Nous nous sommes trouvés ; nos différences nous ont rapprochés…
Nous nous sommes juré un amour éternel.